jeudi 21 octobre 2010

Le grand Eric...

J'adore Eric Fottorino.

Pour plusieurs raisons.






Tout d'abord, d'un point de vue personnel, cet homme à la culture immense, qui dirige un des plus grand nom de la presse française, est d'une modestie et d'une simplicité rare. Il n'est pas rare de l'apercevoir aux alentours des locaux du Monde avec son vélo, pour tout moyen de locomotion. Durant les beaux jours, il m'arrive de le croiser souvent dans un parc du 13e arrondissement, bouquinant seul et paisiblement, semblant fuir les représentations et obligations sociales que lui imposent son statut. Le personnage m'est plus que sympathique, il m'impose un profond respect.

C'est donc avec curiosité que je me suis penchée sur son œuvre littéraire, dont je ne connaissais encore rien. Et là quelle surprise! Eric Fottorino possède une belle plume, en sa qualité de journaliste, je n'en attendais pas moins. Mais il possède une autre qualité, et celle-ci est digne d'un grand, très grand écrivain: Une magnifique sensibilité.

J'ai donc commencé à entamer ses écrits par la lecture d' " Un territoire fragile", et j'ai été impressionnée par la capacité qu'a eu l'auteur pour parvenir à se mettre dans la peau de Clara, une jeune femme battue et brutalisée. Ses tourments, son mal être, sa nostalgie, sa douleur physique et morale, les mots sont à la fois justes et d'une grande pudeur, concédant au livre une sensibilité exceptionnelle, d'autant plus exceptionnelle qu'elle est décrite par un homme.

Mais l'ouvrage qui m'a définitivement conquis fut celui que je découvris par la suite "L'homme qui m'aimait tout bas". A l'âge de 10 ans Eric Fottorino, a été adopté par l'homme qui lui donnera son célèbre patronyme, Michel Fottorino. Il considérera toute sa vie cet homme comme son père, et l'aima comme tel.  Il y a quelques années, Michel Fottorino s'est donné la mort, laissant derrière lui une infinie tristesse. Ce livre est l'hommage d'un fils à son père.

Avec une grande pudeur, Eric Fottorino nous offre ce grand, ce bel hommage et nous touche profondément. Le ton y est juste et sincère, et glissant sur les souvenirs et anecdotes, il nous fait  pénétrer dans leur intimité. Ces deux hommes étaient liés par un amour sans borne et un respect infaillible, qui tentaient de faire oublier l'absence de lien de sang véritable.

Quel beau cadeau nous offre Eric Fottorino. Il nous ouvre sa mémoire et sa douleur, dans un ouvrage qu'il espère salvateur. Il est un homme fin doté d'une extrême sensibilité. A travers ce livre, nous comprenons d'où lui proviennent ces belles qualités.

Extrait:

"Je me demande si je t'ai vraiment connu, si je t'ai vraiment compris. D'où a surgi cette mort? D'une auto familiale qui part sans toi vers Gefsa? Du djebel Tagma et de ses fumées toxiques? De cette tête roulée dans une couverture? D'autres blessures invisibles et profondes? Il y a tout ce qu'on s'est dit, et tous ces silences qui nous attachaient solidement l'un à l'autre. On s'est protégés, toi par ce que tu m'as donné, moi par ce que j'ai renoncé à te demander. Bien sûr, tes mains mises au rancart, les douleurs des autres que tu ne pouvais plus soulager, tes difficultés matérielles: il y avait là de quoi sombrer dans un trou noir. Mais est-ce cela, au fond, ou autre chose que tu as gardé pour toi, une souffrance muette restée inviolée? Ta part obscure que je respecte. Que j'aurais aimé cerner pour la détruire à force d'amour. "




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